
Projet conceptuel
La Société de Transport de Montréal (STM) gère les transports en commun de l’île de Montréal (métro, bus, train, vélo, autopartage). Son application Chrono permet de consulter les horaires et de planifier ses trajets. Par contre, on ne peut pas acheter des billets ni recharger sa carte OPUS.
Client
Société de Transport de Montréal (STM)
Secteur
Transport
Durée du projet
Déc 2023 - Jan 2024
Contexte
Quelles sont les principales différences entre les transports en commun au Canada et en France ?
Au Canada, la neige et le froid ralentissent souvent les bus, alors qu’en France, les intempéries ont peu d’impact.
Les villes canadiennes sont conçues pour la voiture et le réseau reste limité hors des grandes agglomérations. En France, les transports en commun permettent de se déplacer facilement en transport en commun.
Les trajets en train sont chers au Canada, environ 300 $ pour un Montréal–Toronto. En France, un Lyon-Paris coûte moins de 100 €.
À noter que la carte OPUS, similaire au Passe Navigo de Paris, est une carte rechargeable qui remplace les billets papier. Elle est utilisée dans les régions métropolitaines de Montréal et de Québec.
Problématique
Alors que je me rends au gymnase pour jouer au volley par un froid de -30 °C et sous la neige, je dois prendre le bus. Zut ! Je n’ai que quelques pièces et un billet de 20 $.
Le chauffeur ne peut pas me rendre de monnaie pour des raisons de sécurité. Le bus n’accepte ni carte de crédit, ni achat en ligne. Pour payer, je jette 3,75 $ dans la machine à sous du bus, puis le chauffeur appuie sur un bouton pour faire rentrer l’argent dans la caisse. Sans monnaie exacte ni billet acheté à l’avance, je ne peux pas prendre le bus.
Plutôt que de faire un redesign classique, comme celui de Netflix, j’ai choisi de travailler sur un vrai problème utilisateur que j’ai moi-même vécu.
Machine à sous pour valider la carte ou acheter son billet, à Montréal
“Chaque fois que j’arrive à MTL, ça me saoule d’avoir à passer par une station de métro pour me procurer des cartes sur lesquelles j’ajoute 2 passages. D’ailleurs, j’ai 5 cartes qui traînent chez moi car je ne sais plus s’il y a encore des passages valides dessus ou pas. C’est ridicule.”
Jimmy Fecteau
Directeur d’Espace Proprio
“Je suis sidéré qu'on puisse se faire "revirer de bord" à un arrêt d'autobus à Montréal alors qu'on a de quoi payer via une carte ou un téléphone.”
Rémi Dion
Directeur d’Explor.ai
Challenges
Contrainte de temps
Pendant la période de Noël, je voulais profiter du calme sur le marché de l’emploi pour réaliser un projet à fort impact, capable de toucher beaucoup de monde.
Mon objectif était de terminer avant la nouvelle année pour publier sur Linkedin et bénéficier du regain d’activité à la rentrée. J’ai finalement partagé ce projet le 11 janvier.
Technologie dépassée
Depuis près de dix ans, la STM tente de relever le défi technologique malgré plusieurs projets, en multipliant les projets de recharge mobile et de paiement par carte qui n’ont jamais abouti.
Au moment de mon projet, malgré le plan de modernisation prévue jusqu’en 2027, la seule façon d’acheter ou de recharger un ticket restait de se déplacer physiquement à un point de vente.
État de l’application Chrono en décembre 2023
Pour répondre au problème d’achat en ligne, je vais me concentrer sur les fonctionnalités liées à la carte OPUS
L’application Chrono aide les usagers à planifier et suivre leurs déplacements. Elle permet de planifier un trajet, de consulter les points de vente, de connaître les horaires des bus, de réserver une voiture d’autopartage (Communauto) et de trouver une station de vélo en libre-service (BIXI).
Parcours des fonctionnalités reliées à la carte OPUS
1
En cliquant sur l’icône (1) ou sur le menu (2), je peux consulter ma carte OPUS grâce au NFC (3)
2
Je peux consulter mon solde ainsi que les points de vente à proximité. Cependant, je ne peux ni acheter de billets ni recharger ma carte depuis l’application.
↪ La moitié des actions se fait en présentiel lorsqu’on utilise le transport. Je dois comprendre à quel moment l’utilisateur achète son ticket.
L’absence d’achat intégré dans Chrono entraîne trois impacts majeurs pour l’usager :
Expérience fragmentée
Pour effectuer des actions simples, je suis contraint de quitter l’application et de me déplacer, souvent en attendant dans les files.
Manque de flexibilité
Les usagers doivent organiser leur journée autour des recharges plutôt que de recharger au fil de leurs trajets, ce qui donne l’impression que le système de transport est peu pratique et peu moderne.
Dépendance aux distributeurs
En cas de panne des distributeurs automatiques, l’usager se retrouve dans l’impossibilité totale d’acheter un ticket de transport.
Analyse du parcours d’achat
Le flow se déroule en trois étapes : la recherche d’itinéraire, l’achat du ticket et l’utilisation de ce ticket.
Première étape : recherche d’itinéraire
Ce parcours limite la frustration, réduit le risque d’abandon et renforce la confiance en trouvant des solutions à tous les problèmes.
1
Dès l’ouverture, l’utilisateur peut rechercher un itinéraire sans inscription ni étapes superflues, ce qui réduit la friction.
2
Les erreurs de saisie sont automatiquement corrigées grâce à l’autocomplétion, limitant l’effort demandé.
3
En cas d’horaire indisponible, un horaire alternatif est proposé afin d’éviter la sensation d’échec.
Deuxième étape : achat du ticket
1
L’application s’adapte au profil de l’utilisateur, nouveau ou déjà client, pour éviter de ressaisir les mêmes informations et simplifier l’usage.
2
La validation d’un e-mail fiable et l’envoi de la confirmation garantissent la réception de la facture. Certains employeurs remboursent les frais de transport, ce qui pourrait être particulièrement utile.
3
L’écran récapitulatif confirme que toutes les informations sont correctes, réduisant l’incertitude et renforçant la confiance.
4
Dès la transaction, le billet est immédiatement accessible. Cela élimine tout clic inutile et facilite l’achat de dernière minute.
5
Le billet s’intègre à la liste de tickets de transport. L’utilisateur peut suivre facilement tous ses billets achetés et garde le contrôle sur ses déplacements.
Troisième étape : utilisation du ticket
1
L’usager consulte l’arrivée de son bus en temps réel. Il est en contrôle de la situation et son stress est diminué puisqu’il sait comment gérer son temps.
2
Si le ticket est difficile à lire, la luminosité est automatiquement augmentée. En cas de problème, la facture sert de preuve de paiement. Dans cette situation stressante, l’usager n’est pas laissé sans solution.
3
Dans le bus, le suivi du trajet indique le nombre d’arrêts restants. L’usager se prépare à descendre sereinement.
4
Quand le ticket n’est plus utilisable, son statut change pour éviter toute erreur. Il reste consultable à tout moment, renforçant la confiance dans le service.
En conclusion, le billet de bus se situe entre le digital et le physique.
La recherche d’itinéraire et l’achat se font entièrement en ligne, puisque cela ne nécessite pas d’intervention extérieure, seulement les usagers.
Son utilisation, en revanche, demande une interaction avec le monde réel. On le valide auprès d’une borne ou du conducteur.
La borne joue un rôle central, en transformant le billet virtuel en un billet physique utilisable.
Validation aux bornes
Deux méthodes, le NFC ou le QR code
Le NFC est rapide mais il requiert des terminaux de lecture coûteux.
Le QR code, en revanche, est simple à déployer avec un budget dix fois inférieur au NFC. Il peut être partagé en cas de batterie déchargée, ce qui n’est pas possible avec le NFC.
En résumé, le QR code est plus économique et simple à mettre en place. Il est déjà utilisé dans plusieurs grandes villes européennes.
Applications de transport qui délivrent un QR code pour valider son billet
Utilisation du QR Code
En voyage à Hambourg et Tallinn, j’ai eu l’opportunité d’utiliser la validation par QR code.
À Hambourg, j’ai été surpris de ne pas avoir à valider mon ticket à une borne. Le système repose sur les contrôles aléatoires effectués par les agents. Cela implique une grande confiance envers les usagers, mais il n’existe pas de chiffres prouvant que cela entraîne davantage de fraude qu’avec un contrôle classique.
À Tallinn, en revanche, il fallait valider le QR code dans un lecteur à chaque trajet. Cette procédure m’a semblé très simple et rapide : il suffisait de présenter le code devant le terminal, qui le scannait instantanément.
Borne de validation à Tallinn
Analyse concurrentielle
Je vais comparer le placement du bouton d’achat pour favoriser la conversion.
Helsinki, achat dès le début du parcours
HSL, application de transport à Helsinki
1
La tarification dynamique ajuste le prix en fonction du nombre d’arrêts que l’on fait. L’utilisateur a l’impression de payer moins cher pour un même trajet.
2
Le bouton apparaît dès le début de la planification. L’accès rapide du bouton réduit l’anxiété et permet d’acheter immédiatement, même en situation d’urgence.
Amsterdam, achat à la fin du parcours
GVB, application de transport à Amsterdam
Le bouton n’apparaît qu’à la fin de l’écran. L’usager doit consulter tout le trajet avant de payer, ce qui peut frustrer les personnes pressées.
↪ Cette approche génère de la friction cognitive, car l’utilisateur doit traiter beaucoup d’informations avant d’acheter son billet.
Elle reste cependant adaptée pour les trajets complexes où il est utile de voir l’ensemble du parcours. C’est souvent l’emplacement utilisé pour acheter un billet de train.
Hambourg, achat en tout temps grâce au sticky
HVV, application de transport à Hambourg
La disponibilité permanente du bouton réduit la charge mentale de l’utilisateur et rend le parcours plus fluide, sans avoir à scroller pour retrouver le bouton.
↪ C’est donc naturellement que j’ai choisi le bouton sticky afin de ne pas interrompre le parcours de l’utilisateur.
Maquettes
L’usager commence par choisir son itinéraire, puis achète son billet, ce qui évite un paiement inutile en cas de changement de trajet.
Parcours de la recherche d'itinéraire
Parcours complet de la recherche d'itinéraire
Page d'accueil
↪ L’utilisateur comprend rapidement l’application grâce aux codes des applications de navigation, comme Google Maps. Il se sent en confiance grâce au biais de familiarité avec les interfaces qu’il connait déjà.
Il retrouve facilement les fonctions principales comme la barre de recherche, ce qui réduit la charge cognitive liée à l’adaptation.
Recherche et résultats
1
L’utilisateur peut lancer la recherche vocale en secouant son téléphone, ou en utilisant Google Assistant/Siri. Il peut garder ses gants et éviter les erreurs de saisie.
2
Les lieux favoris et récents anticipent ses besoins et évitent les recherches répétitives.
3
L’usager trouve sa destination en saisissant seulement 2 à 3 lettres. L’autocomplétion l’encourage naturellement à compléter les mots qu’il perçoit. Cela réduit l’effort cognitif, les erreurs de frappe et la frustration de taper le nom complet.
4
Le code couleur informe l’usager si le transport est à l’heure ou en retard, lui permettant de savoir s’il doit se presser ou attendre.
5
La hiérarchie visuelle avec la taille de typographie pour le temps de trajet guide son attention et facilite la prise de décisions. Il peut rester à l’abri jusqu’au dernier moment et réduire son temps d’attente dans le froid.
Parcours d’achat du ticket
Pour faciliter la lecture de l’étude de cas, le parcours d’achat est découpé en plusieurs écrans.
Découvrez le prototype complet pour vivre l’expérience comme un véritable usager.
Parcours d’achat du ticket complet
Détail du trajet
1
2
Il peut suivre son trajet en temps réel : sa position avance le long de la ligne bleue au rythme du bus, avec les points d’arrêt indiqués sur la carte. La liste complète des arrêts à venir est visible une fois le nudge ouvert.
3
L'utilisateur découvre intuitivement qu'il y a plus de contenu disponible grâce au nudge.
4
Le bouton sticky simplifie l’achat de billet sans avoir à parcourir l’écran, ce qui réduit la charge cognitive.
5
Il reçoit automatiquement les informations sur les incidents grâce à l’horaire du prochain bus, réduisant son anxiété d’anticipation en lui donnant le sentiment de contrôle.
6
L’usager identifie rapidement son arrêt grâce à l’affordance visuelle, évitant de descendre au mauvais endroit.
Tunnel d'achat
7
La zone est présélectionnée en fonction de la destination, ce qui évite de chercher l’information, surtout lorsqu’on se rend dans un lieu peu familier.
8
Les tickets sont organisés en catégories (unité, multi-passage, durée limitée, abonnement) pour une meilleure lisibilité.
9
La vente incitative se place au moment le plus opportun du parcours d’achat, lors de la conversion.
↪ Par exemple, si un client achète un billet un vendredi après 16h comprenant plusieurs passages, on peut lui proposer un ticket week-end. Ainsi, il pourra effectuer ses trajets à une autre date et bénéficier d’économies s’il réalise plus de 4 trajets pendant le week-end.
10
Proposer divers moyens de paiement permet à l’utilisateur d’acheter plus vite et de vivre une expérience plus moderne. En public où l’environnement peut sembler stressant et peu sûr, il est crucial d’éviter la saisie des informations bancaires.
Écran de succès
11
L’utilisateur obtient la preuve que sa transaction est validée grâce au QR code qui apparait instantanément.
12
La facture est facilement téléchargeable pour avoir une preuve d’achat si la borne ne reconnaît pas le QR code.
Bénéfices pour l'usager
Grâce à l’ajout du paiement, j’ai résolu un certain nombre de problèmes :
La dématérialisation des tickets de transport modernise l’expérience des usagers de Montréal.
Les contraintes liées à la monnaie exacte et aux files d’attente sont supprimées, permettant de gagner du temps et de voyager plus sereinement.
L’utilisateur retrouve le contrôle de ses déplacements en planifiant son voyage avant de quitter son domicile. Il n’a plus besoin d’organiser sa journée autour des tickets de transport. L’expérience devient proactive plutôt que réactive.
Le billet ne peut plus être perdu et l’accès dématérialisé améliore l’accessibilité, notamment pour les personnes à mobilité réduite, qui n’ont plus besoin de se rendre en station pour acheter un ticket.
La réduction de l’impression des billets contribue à limiter l’impact environnemental.
À noter que vous pouvez tester l’application via ce lien.
Maquettes hors du parcours d’achat
Parcours de gestion des tickets
Parcours de consultation des lignes de bus et de métro
Résultat
Stratégie de visibilité
Mon post a généré près de 12 000 impressions, générant 20 commentaires et plus de 100 interactions, ce qui m’a permis d’élargir mon réseau LinkedIn.
Performances de mon post Linkedin suite au projet
Mise à jour de l'application Chrono
Dans le cadre du plan de transformation, la recharge de la carte OPUS a été intégrée à l’application Chrono seulement quatre mois après la réalisation de mon projet.
Le paiement par téléphone et carte bancaire est quant à lui prévu pour mi-juin 2026, si le déploiement se déroule comme prévu. À noter que cette fonctionnalité est déjà offerte à Laval, en banlieue de Montréal, depuis juin 2023.
Évolutions possibles
Améliorer le confort
Rendre l’application moins fatigante pour les yeux grâce au mode nuit, surtout en hiver quand le soleil se couche dès 16 h.
Rendre l’expérience plus accessible aux personnes à mobilité réduite grâce à un fort contraste, une police agrandie ou la lecture audio.
Transférer un ticket à d’autres usagers, pratique surtout quand la batterie est faible.
Anticiper les trajets
Recevoir des notifications en cas de retard ou d’interruption, par exemple lors des tempêtes de neige.
Choisir un bus moins bondé grâce à l’affichage de l’affluence.
Partager un ticket, notamment quand la batterie est faible.
Rendre l’expérience plus ludique
Obtenir des badges comme “Ami de l’écologie” pour 100 km parcourus par mois.
Suivre un classement entre amis selon les kilomètres effectués.
Voir des animations de météo sur la carte, par exemple avec de la neige.